La note de l'écrivain

Le rêve c'est bien, mais la réalité est plus nuancée, plus complexe, terreau du meilleur parfois du pire. L'histoire humaine est jalonnée de rêves aux allures de cauchemars..

Le voyage que notre famille entreprend permet sans nul doute d'être témoins privilégiés de faits souvent ignorés ou mal évalués. Quand on vit, comme le plus grand nombre, abrité par quatre murs et un toit, on a parfois peur mais on suppose que le danger ne passera pas la porte, préférant regarder par la lorgnette (le petit écran) ce qui se passe au-dehors. Le danger n'est pourtant pas dans la réalité, mais dans le fait de ne pas vouloir la voir, où d' en nier une partie, car elle n'est ni bonne ni mauvaise, elle est ce qu'elle est.

Notre gazette s'invite dans vos boudoirs chaleureux, petit moment de pause, réflexions, idées, impulsions et initiatives pour que résolument attentifs, nous nous souvenions que notre humanité tient dans notre faculté à rêver et notre capacité à transformer nos rêves en réalité. Pour le meilleur et le meilleur!

jeudi 1 octobre 2015

Couffoulens... Terminus? Ou nouveau départ?

L'entrée du Domaine. J'y crois pas, c'est chez nous!




Les roulottes installées sur l'esplanade centrale du Domaine 


Une partie des maisons de vendangeurs du Domaine
Ça y est nous sommes installés au Domaine d’Oustric à Couffoulens. Comme son nom l’indique Couffoulens est un petit village situé au confluent du Lauquet et de l’Aude, non loin de Carcassonne, au sud, à un peu moins de 10 kilomètres, sur la route allant vers Saint Hilaire. Nous avons quitté le Domaine de Gaure début du mois d’Août. Après avoir déménagé nos roulottes, nous nous somme attaqué à la maison que nous occuperons le temps des travaux. Car le Domaine d’Oustric est un grand projet. Il s’agit de transformer ce Domaine de plusieurs bâtiments en un petit hameau de onze habitations, notre lieu y compris. C’est pourquoi, actuellement, nous occupons une de ces maisons en attendant que la cave viticole que nous investirons définitivement soit transformée. La cave qui nous est destinée est construite sur deux niveaux de chacun 200 mètres carrés. La partie haute sera réservée au logement et la partie basse au travail (studio musique, loges et salle de répétition). Il nous faudra probablement attendre 2 années minimum pour pouvoir l’intégrer. En attendant…

Il nous a fallu 3 jours pour quitter nos roulottes une fois que la maison fût prête (travail de nettoyage intensif, remise à neuf des peintures, réparation de meubles trouvés afin de meubler la surface de 200 mètres carrés). Pas facile quand on vient de 14 mètres carrés avec meubles intégrés ! Nos enfants avaient tous hâte de rentrer dans cette maison où chacun y avait sa chambre, il n’y avait que nous (Xavier et moi) pour traîner de la patte… C’est dur de quitter des roulottes…, une page se tourne. Une page de notre vie qui fût si dense, éprouvante parfois, mais si riche d’expériences.

Le tas de déchets attendant d'aller à la déchetterie

L'aile complète des maisons de vendangeurs, tout au bout et non visible sur la photo: la cave que nous occuperons.
L’enjeu était pour nous de terminer de nettoyer la maison avant que nos enfants reviennent de leurs vacances chez les grands-parents en Belgique. Découvrant cette maison que j’avais jusqu’à lors à peine entrevue, je restai pétrifiée, main sur la poignée, découvrant l’état de  « squat » de la demeure abandonnée. Des toiles d’araignée partout avec leurs araignées respectives, des poignées de portes collantes, des éviers dégueulasses et collants aussi, de la moquette crade à l’étage, des nids de guêpes à tout les volets, une puanteur de vinasse et mégots de cigarette dans chaque pièce. Bref, nous avons investi le premier « Brico » du coin, et nous sommes ressortis avec quelques litres de peintures, des gants malpa roses, du Saint Marc (il fallait bien l’intervention d’un Saint !), du papier à poncer, de la pâte à bois et une bonne dose de courage…

Vue des bâtiments côté nord
Trois semaines plus tard, les enfants revenaient, la maison était « clean » et prête à être investie. Les enfants ont fait « whouaw ! », nous on a fait « ouf ! » et, pressés, ils nous ont demandé d’y mettre leurs matelas, leurs objets personnels, leurs vêtements… Bref, nous avions réussi, ne restait plus qu’à emménager, décorer, faire les courses de la rentrée scolaire, car une semaine plus tard la rentrée démarrait déjà.

Vue de notre future cave côté nord

Cette rentrée fût assez éprouvante. Ysaline notre aînée découvrait l’univers du lycée avec bien sûr ses injustices, ses absurdités et sa bêtise. Il a fallu écouter tous les soirs le récit de sa journée une fois de plus, pénible… Heureusement, elle poursuivait sa formation à la Fabrique des Arts en piano et chant et cela l’aidait à tenir le coup. Les deux du milieu, Mado et Gaspard, étaient quant à eux, un peu mieux rôdés… Erwenn, lui, montrait de plus en plus de difficulté à se rendre à l’école, il exprimait son ennui et disait ne rien trop comprendre au travail demandé…ça tombait bien, comme c’est demandé en Occitan (la Calandretta étant une école en immersion occitane), nous non plus on n’y comprenait rien !

Le pigeonnier qui servira dans un premier temps de studio musique et ensuite de gîte pour mes beaux-parents


Oh! Une cuisine aussi grande qu'une roulotte!

Et qu'elle est jolie la cuisine...!

Une salle à manger comme dans les châteaux!
Reste à faire, maintenant que tout ce petit monde est éclaté dans ses parcelles d’aventure personnelles, le ménage de 200 mètres carrés, des rideaux pour chaque fenêtre, l'entretien des allées, la réparation d'une des chasses d'eau, la lessive pour 6 personnes, les allers-retours de chacun à la Fabrique des Arts (car, dieu merci, l’école, c’est pas l’tout !), Gaspard fait de la batterie, Mado de la Danse, Ysaline du piano et chant, Xavier du chant, et moi-même du violon, (ça en fait des allers-retours), Erwenn est sur liste d’attente pour la guitare électrique il veut jouer du ACDC, il trépigne, les courses de la semaine, le nettoyage et les chantiers de réparation sur nos roulottes, les devoirs des enfants quand ils rentrent, les dossiers de demandes de subsides pour la compagnie du Contoir Déambulatoire pour une nouvelle création, nouvelle création qu’il faut imaginer et faire bien sûr, l’amende à payer de 90 euros pour non marquage du stop à du 2 kilomètres à l’heure (c’est pas une blague), les papiers à ranger, la citerne de gaz à faire remplir en vue de l’hiver qui approche (la maison possède le chauffage et l’eau chaude au gaz), l’orthodontiste à aller voir avant les quatorze ans des enfants ou sinon ce n’est plus remboursé par la sécu et dans ce cas là on se retrouve avec les dents pourries ou pire à 46 ans comme moi, aller voir le dentiste pour moi justement, téléphoner au médecin pour faire des ordonnances qui permettent à ma fille de s’hydrater à la demande et de se rendre aux toilettes quand elle le souhaite (au lycée c’est interdit), faire pipi parce que moi j’y ai droit mais j’oublie,…
Toute la maison est baignée de lumière...
...
Notre incroyable salon.


Même la porte s'est mise sur son 31...



Quand on avait fini de jouer, les gens venaient nous voir et certains me posaient cette question qui revenait régulièrement : « Quel courage ce que vous faites, et en plus avec quatre enfants !… Mais… comment vous faites ? ». Je ne savais que répondre, il ne s’agissait sans doute pas de courage mais d’envie. Aujourd’hui, même si je bénis le ciel de m’avoir donné ce lieu magnifique pour y mettre tout ce petit monde à l’abri et permettre à chacun de continuer sa route, je comprends mieux cette question. Pour ces gens qui me questionnaient, le fait de vivre en roulotte et la difficulté que cela supposait venait probablement s’ajouter à la longue liste des multiples choses absurdes qu’il leurs fallait faire dans un monde régit selon les lois de la sédentarité et de la rentabilité la plus outrancière… Pour moi, ce monde là était désormais un monde parallèle, avec lequel nous interagissions selon nos propres règles et nos propres rythmes, nous étions libres… 


L'escalier qui monte à l'étage des chambres

La chambre de Gaspard, à côté de celle d'Ysaline

Notre bureau
Notre chambre

La chambre d'Erwenn


La chambre de Mado

Pourrons- nous construire et préserver encore cette liberté dès lors que nous sommes revenus à la sédentarité et aux rythmes fous qui la sous-tendent ? Aurons- nous encore le temps et l’envie de rêver fort et haut, assez haut pour propager nos graines et insuffler parfois l’espoir ? Gageons que ce nouveau lieu, le nôtre, soit une belle pépinière de rêves, il se nommera "la p'tite fabrique du Contoir".


Partout, invitant à la promenade, les vignes s'étendent autour du Domaine d'Oustric